Un ciel bien noir

Alain MAZURE est directeur de recherche au CNRS et travaille au Laboratoire d’Astrophysique de Marseille

Il a débuté sa carrière comme enseignant chercheur à l ’Université Paris VII puis est recruté au CNRS et travaille d’abord à l'Observatoire de Paris-Meudon.

Après une thèse sur l'application de méthodes statistiques à la physique atomique, il s 'oriente vers ce qui l'a toujours attiré: la cosmologie. Il s’intéresse particulièrement à la problématique de la « masse cachée » dans les amas de galaxies. Avec des collègues français et étrangers, il met en place dès les années 1980- 1990 des grands programmes d’observation des grandes structures de l’Univers.

Après un séjour à l'Université de Montpellier, il fonde en 1994 le groupe de cosmologie au Laboratoire d’Astrophysique Spatiale de Marseille et participe toujours à son développement.

Ses activités sont orientées principalement vers la problématique de la "matière noire" et de "l'énergie noire", en synergie avec des physiciens des particules et des physiciens théoriciens. Il est auteur (ou co­auteur) d’une centaine de publications dans les journaux spécialisés. Il est également auteur (ou co-auteur) de plusieurs ouvrages sur la cosmologie (cours ou diffusion scientifique).

Y a t-il spectacle plus magnifique que celui du ciel d'une nuit d'été ? On peut y chercher avec bonheur les zébrures fugaces des « étoiles filantes » ou contempler sans se lasser l'éclat des milliards d'étoiles de notre Voie Lactée.

Y-a-t-il plus belles images que celles des planètes de notre système solaire envoyées au cours de leur périple par les sondes spatiales ?

Et pourtant, ces images sont en partie trompeuses ! Le Cosmos qu'elles nous révèlent ne serait qu'une infime part de l'Univers réel.

L'aspect trompeur des belles images du Cosmos n'est pas dû à la limitation de nos sens usuels. Si nos yeux ne sont sensibles qu'à une infime part (« le domaine visible ») du spectre électromagnétique, la technologie actuelle permet d'explorer ce spectre dans sa totalité, du domaine radio aux rayons gammas. En dépit de ces moyens extraordinaires, l'essentiel de la masse, cause de la rotation des étoiles dans les galaxies spirales ou des mirages gravitationnels au sein des amas de galaxies, reste indétectable. Cette « masse cachée » ne se manifeste en effet que par son action gravitationnelle.

Par ailleurs, le modèle du « Big Bang » est devenu le « standard » de la cosmologie et rend compte avec succès (avec de nombreux autres phénomènes) de l'expansion de l'Univers, expansion dévoilée par la « fuite des galaxies ».

Confortés par ces réussites, les cosmologistes eurent pourtant une surprise de taille avec, dans les années 95, la découverte de l'accélération de l'expansion cosmique alors que, dans le « modèle standard » dominé par la matière noire, elle ne peut que se ralentir.

Pour interpréter ce nouveau phénomène, il semble inévitable aux physiciens et cosmologistes d'invoquer une « énergie noire », possible fossile des phases quantiques de l'Univers primordial.

La « quête » de cette matière noire et de cette énergie noire qui représenteraient ~ 95% de la matière et de l'énergie totale de l'Univers est bien sûr un des axes de recherche les plus actuels et sûrement des plus passionnants de la cosmologie et de la physique fondamentale.